Qu’y a-t-il dans la tête de Patrick Moya ? Tentative d’explication en forme d’exposition intro-rétrospective destinée à éclairer l’œuvre de cet artiste hors norme, parvenu à la maturité de son talent.
“Je suis passé de la BD à l’art, puis à l’art conceptuel, au body art, à l’art sociologique, à la vidéo et enfin à la télévision de masse, en direct … avec chaque fois le même enthousiasme et la même fougue”, disait Moya quand il était étudiant. Si l’on trouve des signes de l’enfance dans son œuvre – les petits jardins, le cirque, les clochers, un bestiaire singulier – c’est lors de sa formation à l’école d’art de la Villa Arson à Nice, au milieu des années 70, que l’on peut identifier les fondamentaux conceptuels de son travail jusqu’à ce jour. Fasciné alors par la télévision qu’il regardait jusqu’à 36 heures par semaine, loin de rejeter la société du spectacle debordienne et assumant sans état d’âme le narcissisme comme moteur créatif, Moya conclut que la place de l’artiste dans le monde contemporain est au cœur de l’œuvre.
Quand on lui demande s’il aurait préféré être Hergé ou Tintin, sa préférence va sans hésitation vers le second, qui n’est pas l’exécutant du héros mais le héros, lui-même. Mu par l’intention démiurgique de bâtir un monde dont il serait le centre, l’organisateur et le principal protagoniste, Moya se dépense sans compter – on recensait déjà plus de 4 200 œuvres en 2011 – pour marier Guy Lux et Mc Luhan, mondes réels et virtuels, dessin et art vidéo, dont il pressent l’émergence malgré le scepticisme de ses professeurs à la Villa Arson, culture populaire et réflexion théorique, travail sur ordinateur – triturant en pionnier du pixel art l’aridité du langage basic sur son Thomson MO5 – et séances de live paintings où son trait sans repentir le conduit à réaliser de nombreuses performances publiques.
Art naïf, art numérique, art sacré – il s’est notamment attelé 4 années durant à une fresque monumentale pour la chapelle de Clans – la pratique de Moya est aussi multiple que ses avatars, qu’il a d’emblée perçus comme l’expression même de sa condition d’artiste, bien plus créature que créateur. “J’ai toujours rêvé d’être universel, par la pratique de nombreuses techniques et styles, et par la multiplication de mes avatars.” Cette exposition rétrospective introspective est l’occasion d’explorer toutes les facettes d’un artiste qui, à l’image de sa célèbre Dolly, conçue à l’origine pour les soirées les plus gay-friendly de la Côte, s’avère décidément bien plus complexe que son univers sucré le laisserait imaginer.
Le Cas Moya
exposition à partir du 19 décembre 2017
Galerie Lympia, 52 bd Stalingrad, port de Nice.
Entrée libre. Ouvert du mercredi au dimanche de 10h à 12h30 et de 13h30 à 17h30.
galerielympia.departement06.fr