Mode

Missegle aux pieds de laine

En 1983, Myriam Joly, ingénieure agronome, se met en tête de revitaliser la filière du mohair en France depuis sa ferme tarnaise. Devenue cheffe d’entreprise, elle lance une production d’accessoires en laine, sauve des emplois, modernise la production et décroche le label EPV avec sa marque Missegle. Rejointe par ses deux fils, elle poursuit une aventure entrepreneuriale unique qui rime avec durabilité, innovation, transmission et responsabilité sociale 100% made in France.

Le mohair est une matière idéale, chaude, douce, confortable. Mais on ne sait plus la produire. Nous sommes en 1983. Myriam Joly, jeune ingénieure agronome, qui connaît bien l’histoire de la chèvre angora, découverte au Cachemire et au Tibet il y a 2 000 ans, sédentarisée en Turquie près d’Ankara (d’où le nom), importée en Europe mais disparue de France, se prend à rêver. Elle veut réimplanter la race et relancer la filière du mohair français. On est encore loin de la vogue pour le made in France mais sa vision et son courage posent les bases d’une formidable aventure humaine nommée Missegle. 40 années de travail et de respect pour les matières naturelles, d’audace et de rigueur dans la gouvernance. Soucieuse de l’humain et de l’environnement.

D’éleveuse, dans sa ferme éponyme de Missècle non loin de Castres, au pied du sommet granitique du Sidobre, elle ne tarde pas à devenir cheffe d’entreprise, en négociant sa production de chaussettes en laine sur les marchés ou par correspondance, puis en reprenant à quelques années de distance deux ateliers de tricotage pour en sauver les emplois, le matériel et le savoir-faire précieux. Rejointe par Olivier et Gaëtan, deux de ses trois fils, elle fait de Missegle un exemple de réindustrialisation maîtrisée. Achat de machines de tricotage 3D, pour produire à partir d’un seul fil des pulls sans couture gênante et sans aucun déchet. Obtention du label EPV (Entreprise du Patrimoine Vivant) notamment pour sa technique de remaillage à la main qui consiste à assembler deux pièces de tricot par l’ajout manuel d’un rang de maille entre les mailles, qu’elle est l’une des dernières à pratiquer. Recherche et développement de la chaussette réputée la plus solide du monde, par un tricotage spécialement renforcé à base de fibre polyamide. Système automatisé de mise en forme des chaussettes à la vapeur, économe en eau. Recyclage, avec l’aide de la Filature du Parc voisine, des rares déchets de production en fil à retricoter. Engagement zéro plastique dans toutes ses livraisons.

Pour garder le cap, l’entreprise crée M L’école qui transmet son savoir-faire et forme à des techniques disparues des radars de la formation professionnelle. Ou se dote d’un nouvel atelier flambant neuf à la réalisation exemplaire. Structure bois en bardage de pin Douglas issu des scieries voisines, sol en granit local du Sidobre, toiture photovoltaïque qui assure plus de la moitié des besoins du site en énergie et aménagement intérieur conçu avec l’aide de la designeuse matali crasset, en phase avec les désirs de l’ensemble des salarié·es : bureaux paysagers façon cabanes lumineuses, espace ouvert de co-création, lieu de détente avec terrasse, salle de sport, cuisine collective. Chez Missegle, c’est l’humain qui prime. Dans les relations professionnelles, au sein du solide réseau qui fédère partenaires et sous-traitants, comme parmi les collaborateur·trices qui, signe qui ne trompe pas, sont les visages mêmes qui incarnent partout l’entreprise. Et si vous préférez la voix, la suite est juste ici.

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