Menton, pays du citron aux commandes du Mirazur, Mauro Colagreco n’en finit pas de surprendre par sa cuisine originale et innovante.
Que de chemin parcouru en 10 ans ! Mauro Colagreco se souvient de l’ouverture du Mirazur : « Je travaillais avec deux personnes en cuisine et deux personnes en salle, c’était un défi extraordinaire. Maintenant nous sommes vingt aux fourneaux ! » confie le chef, sourire tranquille et yeux pétillants. « Au début de mon parcours, j’ai rencontré des difficultés énormes, mais j’aimais tellement ce coin de Méditerranée, j’ai gardé espoir et depuis c’est une belle évolution » poursuit-il. Il se demande aussi comment et pourquoi il est parvenu à cette réussite qui lui a fait décrocher la 6ème place dans le prestigieux World’s 50 Best Restaurants en juin dernier et afficher 2 étoiles Michelin depuis 2012.
« Le terroir avec ses produits de qualité détient certainement une des clés, mais aussi mes origines : je suis né et j’ai grandi en Argentine. Plongé dans deux cultures, basque de ma grand-mère et italienne de mon grand-père, à Menton, à deux pas de la frontière, j’ai établi un ‘trait d’union’ entre ces deux mondes où j’évolue avec liberté… » Et puis cet incessant désir d’exploration, à travers des voyages autour du globe et aussi dans les voyages du quotidien : les rencontres, tôt le matin, de « ses » pêcheurs attitrés sur le vieux port ou des paysans au marché des halles, sans oublier les virées à Sospel à la recherche de fromages exquis… « Fréquenter ces producteurs c’est une vraie richesse, et puis à midi, au Mirazur avec les clients, voyager à travers leurs univers multiples… »
Terre, mer et potager
Sa cuisine se décline autour de trois thèmes : mer, jardin et montagne. « Une cuisine qui a la chance d’avoir son potager se donne une troisième dimension, c’est une façon d’amener la nature telle quelle dans les assiettes et aussi le moyen d’expérimenter à travers d’anciennes variétés, des fleurs, des aromatiques. Au potager du Mirazur nous appliquons des pratiques issues de la biodynamique ; comme la récupération de l’eau de pluie, le compost, l’installation de plantes amies. » Le chef, tout en étant adepte d’une cuisine innovante, soutient ardemment la tradition. Avec la complicité de Karim Djekhar de l’Huilerie Saint-Michel, une institution depuis 1896, il a remis au point d’anciennes recettes mentonnaises autour de l’huile d’olive ; une gamme parfumée aux arômes d’agrumes du terroir.
« Pour célébrer les dix ans du Mirazur, j’ai invité dix chefs prestigieux venus du monde entier. »
Mauro Colagreco se remet en question quotidiennement : « C’est le secret de l’évolution », lance-t-il avec un sourire espiègle… Toujours à l’affût d’idées nouvelles, il a ouvert récemment à Paris la brasserie Grand Cœur pour expérimenter autrement. Et puis, retour aux sources, dans sa ville natale, La Plata, il vient de réaliser un projet qui lui tenait à cœur : l’ouverture d’une chaîne de burger de haut niveau qualitatif appelée Carne ; pour faire vivre les lieux il compte sur le soutien d’un ancien collaborateur et de sa sœur. C’est un concept global qui invite les éleveurs de bétail à se réapproprier leurs terres consacrées actuellement à la monoculture. Mauro Colagreco leur assure soutien et achat de leur production à la condition que le bétail soit élevé en pâturage, comme autrefois. La qualité du pain jouera aussi un rôle important ainsi que les légumes de saison. « Nous essayons de renverser les tendances, c’est un message fort que nous souhaitons mettre en avant. Cela me permet aussi de me rapprocher de mon pays », confie-t-il. Toujours en Argentine, d’autres plans sont en préparation dans un avenir proche.
L’aventure de la ‘bonne cuisine’ ne fait que commencer.
À suivre sur Mirazur.fr
Article initialement publié sur Marie Claire Maison Méditerranée