Mode

Chandam. Une laine si fine qu’elle en est transparente

Néo-créatrice engagée, Éléonore Bricca a choisi la voie de l’éthique pour insuffler un supplément d’âme à la mode et de l’enthousiasme à nos tiroirs. Avec Chandam., sa jeune marque haute en couleur, elle réactive une fibre sensible qui relie les producteurs locaux aux aspirations d’une clientèle quête de style et de sens. Non de la ferme à la fourchette, cette fois, mais du champ au chandail.

Du naturel, de l’âme et un savoir-faire artisanal, c’est tout Chandam. Jeune marque azuréenne engagée en faveur d’une mode plus vertueuse mais aussi plus locale, elle s’attache depuis 2020 à remplir nos tiroirs de douceur et de couleurs. C’est en scrutant en vain les étiquettes de son dressing que sa fondatrice, Éléonore Bricca, constate l’absence : « aucun pull à la fois 100% naturel, design et issu de circuit transparent n’existe. » Une anomalie que la trentenaire décide de corriger, mettant à profit ses compétences d’ingénieure agronome. Le maître-mot de son projet : la reconnexion. C’est suite à sa rencontre avec un éleveur de brebis mérinos d’Arles, près de Guillaumes dans les Alpes-Maritimes, que la jeune entrepreneuse a le déclic. « Cet homme n’avait pas vendu sa laine depuis deux ans. Il la revendait un prix dérisoire sans savoir où elle partait. Ça n’était ni intéressant ni motivant pour lui alors je lui ai exposé mon projet : concevoir un fil peigné à partir de sa laine, afin d’élaborer un pull responsable. L’aventure Chandam. a commencé là. » Triage, peignage, filage, les étapes et les essais se multiplient jusqu’à obtenir le fil parfait aux yeux d’Éléonore, doux, solide et fin. « En France, seuls 5% de la laine récoltée sont revalorisés localement. C’est regrettable, non ? L’atout de notre région Provence-Alpes-Côte d’Azur, c’est de compter quatre différents types de laine. J’ai choisi celle du mérinos d’Arles car c’est la mieux adaptée pour la confection et la plus accessible pour les néophytes du tricot. »

Aujourd’hui, Chandam. propose une dizaine de pièces colorées, du pull au cardigan en passant par l’écharpe. Des créations d’allure moderne, élaborées en collaboration avec la styliste Allison Turpaud, avec qui la marque travaille depuis sa première collection en septembre 2021. Disponible sur le site de la marque depuis septembre dernier, la ligne 2022 est tricotée à partir du fameux fil Chandam., résultant d’un sourcing local et de deux années de recherche et développement. Deux nouvelles nuances viennent de s’ajouter à la palette déjà haute en couleur de Chandam. : le vert Émeraude et le bleu Givre. « Je travaille en co-création avec ma communauté. Je partage différentes couleurs, différentes coupes sur les réseaux sociaux pour valider, ou non, mes idées. Cette année, le vert était fortement demandé donc je l’ai intégré. Deux autres coloris se sont également démarqués, le bleu électrique et le fuchsia, je les inclurai certainement pour la prochaine saison. ». Pour l’heure, une mini-collection printemps/été 2023, composée de deux débardeurs et d’un short, vient titiller notre fibre sensible. Disponible en pré-commande dès la mi-mai, elle n’est pas confectionnée à partir de laine mais, cette fois, de lin 100% européen. Des pièces garanties Oeko-Tex, conçues à partir de matières premières naturelles traçables, tracées et vertueuses pour l’ensemble des acteurs. Cette transparence de production est d’ailleurs déjà récompensée par les professionnels. Chandam. a ainsi reçu le prix booster Petite entreprise lors des Trophées européens de la mode circulaire en 2022. « Cette victoire nous a apporté beaucoup de visibilité mais surtout de la crédibilité au sein de l’industrie textile. Grâce à ce titre, nous avons reçu de nouveaux financements pour développer davantage la marque. Une aubaine ! »

Quand la mode renoue avec le respect de la terre

Le contact aux matières premières naturelles, la jeune Antiboise y est habituée. Cette ex-cheffe de projet dans la cosmétique est une passionnée de la création. Elle aime toucher, sentir les matériaux qu’elle utilise tout en mettant un point d’honneur à rencontrer leurs fabricants. Au travers du choix de ses partenaires – qu’elle espère les plus proches possible –, Chandam. s’attache à renouer avec les savoir-faire perdus au cours des dernières décennies de désindustrialisation. Plus qu’un retour à une fabrication locale, c’est la reconnaissance des métiers d’éleveur et d’artisan qui anime Éléonore Bricca. Un point essentiel pour cette petite-fille de paysans-métayers. « Je trouve qu’on s’est peu à peu déconnecté de la terre, de ce qu’elle nous offre et nous permet de faire aussi. C’est important pour moi de revaloriser ce lien entre les éleveurs et les consommateurs. Je veux mettre en avant les hommes et les femmes qui produisent de quoi nous nourrir mais aussi nous vêtir. » Pour compléter sa démarche, la marque reverse 1% de son chiffre d’affaires à l’association Terre de Liens. Une organisation œuvrant pour un développement rural et paysan respectueux de nos écosystèmes et de leurs habitants.
Aujourd’hui, la jeune femme arbore plusieurs casquettes, tour à tour créatrice, enseignante en responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et, plus récemment, experte en développement de filières durables auprès de professionnels des secteurs mode et luxe. « Chandam. est en quelque sorte le condensé de mes activités. Il faut toucher à tout dans l’entreprenariat ! (Rires.)  Le secteur textile m’était complètement inconnu donc la réussite est encore plus belle. Je suis parvenue à créer un cercle vertueux autour de ma marque, à créer une fibre 100% naturelle dont peuvent bénéficier d’autres designers pour leurs projets personnels. Mon objectif est de normaliser une filière textile totalement transparente, relocalisée, impliquant paysans et artisans. »

Remettre du care et du sens dans une production de mode vertueuse

Qu’elles soient Émeraude, Tangerine, bleu Nuit, voire parfois les trois, les créations Chandam. osent la couleur. Elles constituent même l’essence de la marque : « Je veux que la couleur reflète toute l’intensité de la vie. Le pull Mati en est l’exemple. Contrairement à l’imprimé marinière classique, celui-ci comporte quatre coloris. J’ajoute des « couleurs accidents » comme j’aime les qualifier, pour des combinaisons inattendues et surprenantes. De plus, la laine se teint facilement et permet une palette de couleurs incomparable. » Des créations féminines, douces et éthiques, qui s’adressent à toutes les générations avec âme, conscience, style et sensibilité. « La femme Chandam. veut avant tout s’affirmer. Elle est sensible au monde qui l’entoure, à son environnement. Elle est à la fois blagueuse, hippie, un brin bourgeoise. (Rires.) »
La marque commercialisera prochainement une gamme Do It Yourself, comprenant des pelotes de fils à tricoter ainsi que des modèles, pour confectionner de vos doigts de fée votre propre création, au fil de la belle histoire Chandam.

chandam.co

Éléonore Bricca, fondatrice de Chandam entourée de mimosa.
Éléonore Bricca, fondatrice de Chandam.

Légendes 1. Les pulls Mati, Synes et Zoé, disponibles en différents coloris et entièrement fabriqués en laine mérinos française, sont conçus pour séduire toutes les générations. © Victoria Roblin 2 : Éléonore Bricca, fondatrice de Chandam. Antiboise passionnée et engagée en faveur d’une mode plus vertueuse et locale. © Walter Aigner