Si l’univers du jean et du chino est depuis l’origine peuplé de références à l’ouest américain, aux grands espaces et à la route telle que la pratiquaient hobos, beatniks ou hippies de légende, un jeune et courageux label français a entrepris de populariser l’idée de modèles vertueux, made in près de chez vous. 1083 représente en kilomètres la plus longue diagonale à traverser la France, qui relie les falaises du Finistère à la frontière ligure, garantie d’un impact carbone minimum et d’emplois relocalisés. 1083, c’est aussi le nom de ce label éco-friendly qui fait de Menton le nouveau terminus d’une Route 66 aux parfums de Riviera, troquant l’ennui beige des standards états-uniens contre les tonalités pimpantes de la joie de vivre au sens le plus matissien du terme. Une mode réjouissante à découvrir à toutes jambes.
Porspoder, 1 810 habitants. Cette agréable commune du Pays d’Iroise en Finistère avait bien connu un bref épisode de gloire lors du concert de Joe Dassin au Zodiac, le club d’Anne-Louise et Hervé Blaize, quelque part dans les années 70. Mais depuis rien. Jusqu’à l’arrivée de Thomas Huriez. Non pas sur ces rivages bretons, scrutant au loin Ouessant, mais à Romans-sur-Isère dans la Drôme où le jeune entrepreneur, à la tête de sa bien nommée société Modétic, s’est mis au défi de réveiller le fief de la chaussure française pour y faire des pantalons. Alors pourquoi Porspoder ? Figurez-vous que, pour Thomas qui connaît sa géographie hexagonale comme la poche de son premier jean, c’est le point le plus distant de Menton, la ligne tracée entre ces deux extrêmes matérialisant le chemin le plus long que l’on puisse parcourir en ligne droite à travers la France. Très exactement 1 083 kilomètres (tiens, presque autant que d’habitants à Porspoder). Soyez-en sûr.e, Thomas ne voulait pas épater la galerie en choisissant ce toponyme singulier. Si c’était le cas, il aurait sans doute placé malicieusement son point extrême sur l’Île de Melon, elle-même située sur la commune de Porspoder, et dont l’association Melon-Menton aurait pu s’avérer cocasse. Non, l’idée, vous l’avez bien compris, consistait à prendre un engagement d’avenir, comme un manifeste de mode éthique : aucun produit issu des ateliers de la marque ne traversera jamais plus de 1083 kilomètres pour venir vous habiller.
Adieu donc american dream usurpateur, qui avait réussi à nous vendre des toiles denim comme des promesses de liberté, alors que les vraies étaient bien de Nîmes, qui se trouve finalement à 3 h 17 minutes à peine de Romans par les départementales. Adieu aussi manufactures asiatiques, laissons-leur les routes de la soie, et gardons celle qui relie ce point un peu magique où l’Atlantique rencontre la Manche – Porspoder toujours – à notre perle de la Méditerranée – Menton donc. Destination emblématique et ensoleillée à laquelle 1083 dédie aujourd’hui ses deux nouvelles pièces, réunies sous l’invitation « Voyage à Menton ». En deux tons et trois mouvements – souples, évidemment, qu’autorisent l’irréprochable qualité du coton bio utilisé et la coupe impeccable du désormais classique chino de la marque – direction la Riviera Française et ses joyeuses polychromies. Si l’esprit de la ville inspire ici une palette aussi fruitée qu’acidulée, ce n’est pas de jaune citron qu’il s’agit mais d’un coloris pêche, énergique, lumineux, pour tout dire estival pour le modèle féminin à la coupe fuselée, et d’un coloris tilleul, tout aussi inattendu, de coupe ajustée pour le modèle masculin. Mais, après tout, vous faites comme vous voulez. En attendant, ce pantalon en toile de coton bio, filé, teint, tissé et confectionné en France – en partie dans des ateliers marseillais – s’avère non seulement le fruit d’une fabrication exemplaire mais aussi le nouvel indispensable du vestiaire casual méridional.
Des années après avoir lancé son vertueux label 1083, Thomas Huriez, rejoint par Grégoire, Sébastien, Yves, Charlotte, Gaëtan, Rafaële, John, Mariya, David, Amandine, Charline, Loïc, Mélanie, Elsa, Tiên, Mégane, Clémentine, Jean-Pierre, Adja, Angéline, Henriette, Fanny, Carinne, Sara, Charlène, Bastien, Damien, Victorine et bien d’autres encore, a fait la preuve de son bel esprit d’entreprise. Comment ? En créant de vrais emplois – 150, excusez du peu –, en investissant dans le délavage laser, sans danger pour l’environnement et dont l’énergie est entièrement renouvelable, en inventant le concept de jean infini, modèle d’économie circulaire qui garantit que chaque pièce sera recyclée pour se réincarner en une nouvelle paire flambant neuve, ou en créant une école du jean à Romans, pour ancrer durablement un nouveau savoir-faire et créer des chances d’avenir pour une ville et ses habitants (33 465, sensiblement plus qu’à Porspoder).
Une anecdote pour finir. Homme de défi – ça aussi, vous l’avez compris – Thomas avait promis de relier Menton à Porspoder en vélo si, d’aventure, sa toute première collection de jeans atteignait les 1083 pré-commandes. Evidemment, le score fut dépassé et le mois de juillet 2014 fut le théâtre d’un autre tour de France en ligne droite celui-là. Définitivement plus glam à nos yeux que la traversée du Middle West en Chevrolet.