En collaboration avec la galerie Patrick Seguin, la Fondation Luma présente à Arles un ensemble de 12 structures préfabriquées créées entre 1939 et 1969 par Jean Prouvé. Retour sur un visionnaire dont les idées n’ont jamais autant été d’actualité.
Jean Prouvé (1901-1984) n’a jamais fait de différence entre la construction d’un meuble et celle d’une maison, sa motivation première ayant toujours été de mettre l’un comme l’autre à la portée de tous. L’architecte designer su allier l’art à l’industrie, à l’image de l’Ecole de Nancy dont la philosophie imprégna son parcours de pionnier, souvent incompris. Son travail fondé sur le respect de l’authenticité des matériaux, son éthique des technologies industrielles, son utilisation expérimentale de l’acier ou de l’aluminium, qu’il utilisera sous forme de tôle pliée ou de pièces moulées, le font remarquer de Mallet-Stevens.
Procédant d’une logique de fabrication et de fonctionnalité, la « pensée constructive » de cette figure majeure du design du XXe, cofondateur de l’Union des artistes modernes, finira par produire une esthétique épurée de tout artifice qui, aujourd’hui plus que jamais, provoque l’extase et l’affolement des collectionneurs. La conscience sociale de cet inventeur de génie, profondément humain, le conduira naturellement à participer à la reconstruction et à l’urbanisme de l’après-guerre en France. Faits de matériaux peu coûteux mais durables, les bâtiments qu’il crée alors peuvent être facilement assemblés, démontés, déplacés, modifiés, comme autant de réponses intelligentes à des problématiques de logement d’urgence.
Après une première installation de 4 bâtiments dans le Parc des Ateliers d’Arles en mai dernier, la Fondation Luma de Maja Hoffmann en accueille 8 autres près de sa grande Halle, dans un espace aménagé dans une fonderie du XIXe . Un double hommage lorsque l’on sait que Jean Prouvé fit ses débuts dans la ferronnerie d’art. Prouvé a produit des baraquements militaires préfabriqués, des hébergements pour réfugiés, des maisons pour sinistrés et sans abris, des écoles provisoires et même une station-service Total. À la demande de l’Abbé Pierre, fondateur des Compagnons d’Emmaüs, il se fit aussi l’architecte des jours meilleurs – comme le rappelle le titre de cette exposition événement – en construisant une maison éphémère sur le quai Alexandre III dans le Paris de 1956. Empreints d’espoir, d’élégance et de sobriété, uniques ou fabriqués en petites séries, ces systèmes de construction exemplaires sont à (re)découvrir in situ.
Une rétrospective essentielle dont la pertinence fait particulièrement écho à notre époque où la crise du logement, du fait des catastrophes naturelles qui se multiplient et des flux migratoires à l’échelle du monde, est plus que jamais d’actualité.
« Jean Prouvé, architecte des jours meilleurs »
Jusqu’au printemps 2018
La Grande Halle, Parc des Ateliers, 13200 Arles, luma-arles.org
Initialement publié dans Marie Claire Maison Méditerranée