Culture

Visite à la Fondation Hartung Bergman

Sur les collines d’Antibes, domine la Fondation Hartung Bergman. Considérée comme un élément phare de l’architecture du XXe siècle, elle recèle un fonds d’œuvres et d’archives exceptionnel.

 

Sur le tard, après une vie intense marquée par une alternance de moments de bonheur et de périodes de grande adversité, Hans Hartung et son épouse, Anna-Eva Bergman, également artiste, décident de quitter Paris pour s’installer au bord de la Méditerranée. Sur la Côte d’Azur, ils choisissent un terrain en forte pente sur les hauteurs d’Antibes. Isolé, planté d’oliviers centenaires sur deux hectares, le lieu s’accorde avec leur projet : la réalisation d’une maison avec patio et piscine et, en contrebas, leurs deux ateliers. Les travaux commencent en 1961 ; ils ne se termineront qu’en 1973.

Hans Hartung va concevoir les plans, épaulé par une dizaine d’architectes au fil du chantier. Le couple souhaite distinguer clairement le lieu dédié à la vie quotidienne et celui dédié au travail. Durant le projet, Hartung disait avoir tiré son inspiration de l’architecture vernaculaire méditerranéenne, comme précédemment pour la construction de leur première maison aux Baléares dans les années 1932 à 1934. Au sommet d’une colline, encadrant la piscine, la maison d’Antibes s’ouvre sur la mer plein sud. Toit plat, murs blancs, forte imbrication entre intérieur et extérieur. Pour communiquer entre les deux corps de bâtiment qui se font face, séparant les pièces de jour et de nuit, pas de couloir mais un grand patio délimité par les espaces de service.

Au centre, la piscine, chauffée à 35 degrés été comme hiver, pensée d’un point de vue fonctionnel, car l’artiste, handicapé d’une jambe, nageait tous les jours. En contrebas, les deux ateliers se dressent en épousant la pente naturelle et paraissent comme accrochés à la colline. Hans Hartung aimait peindre surtout la nuit. Pendant ses dernières années, particulièrement prolifiques, c’est là qu’il commence à utiliser ses sulfateuses et de très grands formats. Les derniers mois, il concevait jusqu’à une œuvre par jour, au point que ses assistants suivaient difficilement son rythme. Plus question de nettoyer sol et murs, ce qui explique l’état actuel de l’atelier, un univers vif et captivant.

« Le couple présente cette villa comme la réalisation de leur utopie, un lieu pensé non pas pour la retraite, mais pour la production. D’ailleurs, les deux artistes travailleront jusqu’au dernier jour. Et c’était leur souhait que le domaine devienne Fondation. Aujourd’hui, elle a comme mission le rayonnement de leur œuvre. Elle couvre un éventail très large qui va de la conservation du triple patrimoine (architecture, œuvres et archives), à l’organisation d’expositions et de manifestations artistiques d’envergure internationale, en passant par les résidences de chercheurs ou d’historiens ainsi que d’amateurs éclairés qui souhaitent travailler sur ce patrimoine. », explique Thomas Schlesser, le directeur.

La Fondation se prête parfaitement à la recherche. « Le couple a tout conservé du parcours de chacun. Ce fonds d’archives exceptionnel comprend la correspondance personnelle et professionnelle, les catalogues d’exposition, les coupures de presse, des revues d’époque. Cela suppose un travail énorme de classement qui est encore en cours actuellement. », ajoute Thomas Schlesser.

Actuellement, la Fondation ne propose que des ouvertures occasionnelles au public, très encadrées, car le patrimoine est très fragile. Un accès plus simple fait partie des projets à venir.

Fondation Hartung Bergman
173, chemin du Valbosquet, 06600 Antibes, 04 93 33 45 92
fondationhartungbergman.fr

Légendes 1 et 2. En contrebas de la maison, au cœur de l’oliveraie, les deux ateliers sont indépendants tout en étant très proches. Donnant au nord, les vastes pièces ont gardé leur propre caractère. L’atelier de Hans Hartung, caractérisé par ses immenses baies vitrées. L’atelier de Anna-Eva Bergman, distribué sur deux niveaux. 3. Un lieu où donner libre cours à la création, tel était le souhait du couple lors de la réalisation du projet. 4. Anna-Eva Bergman et Hans Hartung à Leucate, 1929 © Fondation Hartung Bergman. 5. Figure incontournable de l’art moderne, Hans Hartung disait avoir pris inspiration de l’architecture « vernaculaire méditerranéenne », lors de la réalisation du projet. 6. Thomas Schlesser, le directeur de le Fondation. 7. Dans les derniers mois de sa vie, l’artiste a réalisé un nombre immense d’œuvres en travaillant souvent la nuit. L’intérieur de l’atelier a gardé toutes ses anciennes empreintes. 8. Regard sur l’espace jour de celle qui était l’habitation du couple, aujourd’hui installé en bureaux de la Fondation. 9. Détails des outils de travail de Hans Hartung, brosses, sulfateuses, branchages variés cueillis en lisière de l’oliveraie…
Initialement publié dans Marie Claire Maison Méditerranée