Elle coule depuis toujours dans ses veines. Fou amoureux de la grande bleue, le Chef du Petit Nice à Marseille a su transcrire son âme en art culinaire.
Le Petit Nice fête bientôt son siècle d’existence. Comment cette belle histoire familiale a-t-elle commencé ?
Mon grand-père a acquis la maison en 1917. Il possédait plusieurs guinguettes et bars à Marseille, et il a tout vendu pour racheter cette villa à une comtesse. Il a ensuite transformé le lieu en restaurant puis en hôtel. Après son décès, mon père, qui poursuivait une carrière lyrique et avait obtenu le premier prix du conservatoire de chant, a rejoint l’affaire familiale. Il a obtenu une première étoile en 1978, puis une deuxième en 1981.
Très jeune, vous vous êtes découvert de grandes ambitions culinaires…
Déjà, j’ai grandi dans une famille où tout le monde savait cuisiner. Nous sommes de souche italienne et espagnole, et le repas familial était très important. Mes parents ont eu aussi l’intelligence de me faire découvrir de grands établissements. Un jour, à 12 ans, j’ai rencontré le grand Chef lyonnais Alain Chapel, triplement étoilé. La cuisine de ce monsieur, l’atmosphère de son restaurant… j’ai vécu une journée comme vous en avez rarement dans la vie, où vous ressentez une étincelle qui vous dit que vous avez une voie à tracer. J’ai compris alors que mon rêve était de décrocher 3 étoiles à Marseille.
En 2008, on vous annonce l’obtention de votre 3e étoile au guide Michelin. Quelle pensée vous traverse alors l’esprit ?
J’ai pleuré comme un gamin. C’est quelque chose que je pensais inatteignable. Du point de vue gastronomique, Marseille à l’époque n’était pas ce qu’elle est en train de devenir. J’étais donc vraiment très ému, et je me suis dit, maintenant, il va falloir combattre pour pérenniser ce que tu as obtenu. J’avais envie aussi de transmettre tout cet amour de la Méditerranée à mes pairs, et de faire venir de plus en plus de jeunes restaurateurs pour qu’ils puissent faire de Marseille ce qu’elle devrait être depuis longtemps : une ville où l’on mange bien.
Une volonté que vous avez concrétisée en 2012 en co-créant l’association Gourméditerranée, qui réunit une soixantaine de chefs et s’active à promouvoir la gastronomie marseillaise et provençale…
On ne peut plus agir seul aujourd’hui. Il faut fédérer un maximum de personnes pour se faire entendre, et faire le meilleur travail possible grâce un maillage de savoir-faire. C’est une tâche de longue haleine, et les premiers résultats sont déjà là. Nous avons obtenu deux étoiles à Marseille cette année. On commence à drainer du monde et les jeunes chefs n’hésitent plus à venir s’installer dans la région. Nous préparons aussi la 2e édition du salon Food’in Sud pour 2016, dédié à la cuisine de la Méditerranée.
À titre personnel, vous avez lancé en mars dernier les Premières rencontres gourmandes de la Méditerranée au Môle Passedat, l’espace restauration du Mucem. Quel bilan tirez-vous de cette première édition ?
Il est très positif. J’ai envie que le musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée soit un catalyseur de la Méditerranée, et c’est pour ça que je fais venir des gens d’ailleurs afin qu’ils montrent leur cuisine. J’ai commencé par Rome avec le chef Anthony Genovese, je continuerai cet automne avec le Liban ou le Maroc. Mon intention n’est pas de m’approprier personnellement tout ceci, mais bien au contraire, de partager tout ce que l’on fait.
À retrouver sur passedat.fr et pour en savoir plus, gourmediterranee.org et mucem.org
Propos recueillis par Laurence Guidicelli.