Dans le centre historique de Milan, à deux pas du Castello Sforzesco, la Fondazione Achille Castiglioni accueille ses visiteurs dans l’atelier-même du légendaire designer. Une visite inspirante.
Lieu emblématique très apprécié des étudiants, chercheurs et passionnés d’architecture et de design, la Fondazione fait partie intégrante de l’itinéraire culturel milanais. À la tête de ce projet, Giovanna Castiglioni, la fille cadette du designer décédé en 2002, qui n’a pas hésité à quitter son emploi dans le domaine de la géologie pour le réaliser. Encouragée par Irma, sa mère, Giovanna se consacre à plein temps à la sauvegarde de ce patrimoine et à la protection de sa mémoire. Très vite, elles tissent un lien étroit avec la Triennale de Milan, dont Achille Castiglioni était l’un des collaborateurs les plus éminents. Achille Castiglioni n’a laissé aucune consigne quant à ce qu’il souhaitait voir advenir de son atelier. Mais, il nous est paru évident qu’il fallait en ouvrir les portes pour partager cette expérience extraordinaire, cette histoire liée à l’évolution du design du siècle dernier, confie Giovanna. Dès 2005, la Triennale de Milan a d’ailleurs choisi de soutenir ce projet familial, un pari gagné comme en témoigne la fréquentation assidue depuis l’ouverture. La visite en soi est une expérience inoubliable où Giovanna nous reçoit comme à la maison.
Niché dans un élégant palais du XIXe siècle, l’atelier est accessible depuis une cour intérieure verdoyante. Dès les premiers pas, c’est un authentique voyage dans le monde de la création qui relate l’expérience de toute une vie. Une enfilade de cinq pièces réunit des espaces amples et lumineux, une infinité d’objets qui s’amoncellent, des notes épinglées aux murs, des rangées de dossiers parfaitement alignés, des maquettes « cultes », des prototypes d’objets en cours, des photos de famille, d’amis designers de passage.
Depuis des décennies, proposés par les plus grands éditeurs, les produits signés Achille Castiglioni ne cessent de surprendre par leur intemporalité. Ses créations continuent d’être éditées par les plus importantes maisons, de nombreuses œuvres “cultes” sont exposées dans les plus grands musées du monde. Dans l’atelier, la présence de Achille Castiglioni est toujours très forte. Ici, des notes, des cahiers… rien n’a changé depuis.
Couverture : Esquisse de la lampe Arco. Dans l’Arco, rien n’est purement décoratif, le créateur affirmait que la fonction est le facteur principal du projet, que chaque objet est réduit à l’essentiel. Considérée comme icône, la suspension Parentesi éditée par Flos.
1. Aperçu de l’une des cinq pièces de l’atelier.
2. Lampadina, créée pour Flos.
3. Portrait de Achille Castiglioni avec Philippe Starck, à l’atelier à Milan lors d’une visite.
4. Giovanna, encouragée par sa mère Irma, a transformé le Studio Museo Achille Castiglioni en Fondation dès 2012.
Une “wunderkammer” fabuleuse où le regard exulte à chaque découverte : le fauteuil Sanluca, la lampe à poser Taccia, la suspension Diabolo, la coupe à fruits-égouttoir, le tabouret Mezzadro, les couverts Dry, le service à huile ACO1 pour Alessi, la montre Record… Un laboratoire d’idées extraordinaire qui résume l’excellence des derniers cinquante ans du design italien.
Actuellement, une équipe conduite par Giovanna travaille à la numérisation et au classement des archives. Leur objectif est de rendre accessible aux étudiants et aux chercheurs ce patrimoine qui reste encore à découvrir. Dans les créations d’Achille Castiglioni, peu de décoration et beaucoup de fonction ! Il éliminait tout ce qui était superflu pour arriver à la forme essentielle, explique Giovanna.
Mon père était un personnage moqueur, il savait stimuler la curiosité, le jeu tout en gardant son sérieux. Il pratiquait la juste mesure avec humilité, il se remettait en question en une autocritique constructive. Dans un esprit ludique, il aimait détourner les objets en les marquant d’une touche d’humour. Nous étions trois enfants, il passait beaucoup de temps à jouer avec nous, je me rends compte maintenant qu’il nous impliquait dans ses projets. Toute la famille participait, notre mère devait tester chacune de ses créations pour les valider. Pour nous, Achille Castiglioni était éternel. Sa disparition nous a surpris. Notre mère a beaucoup lutté pour que les archives ne soient pas dispersées. Dans l’atelier, la présence de mon père est toujours forte, rien n’a changé.
Aujourd’hui, la Fondation implique toute la famille comme un lieu témoin vivant, un voyage unique au cœur du design.
Studio Museo Achille Castiglioni
Piazza Castello, 27, 20121 Milano, +39 02 8053606
achillecastiglioni.it